Transcription de l'épisode : "Merlin Egalité, Morpho: construire un protocole de finance décentralisée"
Terry : Salut Merlin, merci de prendre du temps aujourd'hui pour parler de finances décentralisées. On va un peu démystifier, dégrossir ce sujet avec mon œil novice et ton œil expert du sujet. Avant de rentrer là-dedans, je te propose de te présenter et de nous présenter ce que tu fais aujourd'hui.
Merlin : Déjà, merci Terry pour cette invitation et bienvenue dans les locaux de Morpho Labs. Moi, c'est Merlin Eguénité, je suis un des cofondateurs de Morpho Labs. Pour me présenter succinctement, moi ce que j'ai fait, c'est prépa maths, école d'ingé. Et en fait, durant mes études et l'école d'ingénieurs, j'ai essayé de monter plusieurs projets. Et puis, je me suis aussi intéressé au domaine de l'économie et de la finance où je me suis rendu compte que Ce secteur-là était assez opaque, pas transparent, avec beaucoup de corruption. Et je me demandais comment on pouvait reconstruire tout ce monde-là, tout ce secteur. Et c'est comme ça que je suis tombé sur le monde des blockchains, des crypto-monnaies, où j'ai commencé à essayer de participer, contribuer à des projets open source en tant que développeur. et essayer de créer des projets encore d'entrepreneuriat dans ce milieu-là, jusqu'au moment où Marut a croisé celles de Paul et de Mathis et Julien qui sont mes co-fondateurs, avec qui on a créé Morpho Labs depuis bientôt trois ans. Avec Morfo, notre but c'est de recréer l'infrastructure financière avec des protocoles, en tout cas du code qui est open source, qui est totalement transparent, qui est incorruptible. et qui revient aux sources même de la création d'Internet avec des protocoles immuables comme TCP, IP, SMTP qui en fait sont derrière les mails, etc. On a créé Morpho, on a créé une première version, puis une seconde version très récemment. Actuellement dans l'entreprise on est 25 employés, majoritairement des français avec un bureau en France. et on a quasiment 2,5 milliards de dollars qui ont été déposés sur notre protocole et qui est un protocole de pré-emprunt de crypto actifs donc le but c'est de prêter, d'emprunter des crypto actifs et ça c'est accessible en fait partout dans le monde n'importe qui qui a une connexion internet peut prêter ou emprunter des actifs numériques via le protocole Morpho avec quasiment aucun intermédiaire. Voilà.
Terry : Ok, donc on va un peu dégrossir tout ça et rentrer dans le détail, mais si je devais rephraser ce que tu viens de dire avec mes mots, ce que vous faites c'est que vous construisez du coup l'infrastructure technique qui permet dans le monde des crypto-monnaies de se prêter et de s'échanger de l'argent.
Merlin : Exactement. Donc alors ça va pas être sur l'échange de cryptos en tant que tel, ça va être plus vraiment axé sur le prêt et l'emprunt. D'accord. Donc ce qui peut s'apparenter je dirais dans le monde traditionnel pour les utilisateurs normaux, ça va être vous allez à votre banque, vous faites un prêt à la conso, votre banque va vous prêter de l'argent. Là, ça va être pareil, mais ça va être Morpho. Sur le protocole Morpho, vous allez sur ce protocole-là, et c'est le protocole Morpho qui va vous permettre de créer une ligne de crédit, d'emprunter. Et si vous, par contre, vous avez un excès de capital dont vous n'avez pas besoin, vous pouvez déposer cet argent-là sur Morpho et générer un intérêt, un taux d'intérêt là-dessus.
Terry : Ok, du coup là-dessus, Morpho, vous vous positionnez comme une banque dans les cryptos ou plutôt comme l'infrastructure nécessaire aux banques ?
Merlin : On va dire que c'est plus l'infrastructure, dans laquelle après, nous on aime bien parler de primitives de lending dans notre jargon, mais ça va être une primitive de pré-emprunt où ça va être un protocole très très simple qui va, son but ça va être de mettre en en relation des gens qui ont un excès de capital et des gens qui ont un besoin de capital. Et après dessus, en fait, on peut avoir plein d'acteurs qui vont essayer de créer de nouveaux produits, qui vont se baser sur cette primitive, qui est un peu la couche la plus basse. Il faut voir un peu comme des Legos. et se dire là on a les blocs qui participent à faire, à créer cette fondation et après dessus vous allez pouvoir rajouter des blocs pour avoir une meilleure expérience utilisateur. C'est-à-dire qu'après le but à long terme c'est que par exemple si vous avez votre application Lydia ou Revolut qui vous permet de prêter ou d'emprunter, en tout cas de générer des intérêts ou d'emprunter, plutôt que d'utiliser derrière une banque qui va elle-même utiliser, qui va passer par 10 intermédiaires et qui fait qu'au lieu de toucher 5% vous touchez que 2% ou alors que vous allez payer 5% au lieu de 2% En utilisant directement Morpho en tant que back-end, on va avoir peut-être un ou deux, trois intermédiaires max. Et du coup, en reprenant mon exemple, au lieu de gagner 2%, vous allez peut-être gagner 4,5%. Et pareil pour le côté emprunteur, ce sera beaucoup moins cher d'emprunter.
Terry : Ouais, pardon, je te coupe ça, ça très clair, on va revenir dessus du coup, c'est l'aspect vraiment, l'intérêt de décentraliser les choses. Si on revient pour bien comprendre ce que vous faites avec l'analogie du monde actuel dans le système bancaire, c'est-à-dire qu'aujourd'hui, ma banque, si je vais la voir pour lui faire un prêt à la conso, elle, pour pouvoir me fournir ce prêt, elle s'appuie sur quoi ? Ou de manière très simpliste, mais pour faire, tu vois, le parallèle avec ce que vous êtes en train de construire aujourd'hui, qui est le pendant dans le monde des cryptomonnaies, Alors pour une banque.
Merlin : Ça va être un peu plus compliqué que nous. Bon, je ne vais pas rentrer dans les détails, mais disons qu'une banque peut faire du leverage, c'est-à-dire qu'elle a une quantité d'actifs, et en fait, elle peut prêter plus qu'elle n'a de fonds en tant que tel, entre guillemets, dans ses coffres. Encore une fois, c'est une image. Nous, dans notre cas, ça reste assez primitif, on appelle ça surcollatéralisé, c'est que généralement, quand vous empruntez, il y a toujours un actif derrière qui a une plus grande valeur que ce que vous pouvez emprunter. Donc si on le remet dans la vie réelle, ce serait par exemple, vous voulez faire un prêt de 100 000 euros, vous avez une maison de 200 000, vous pouvez le faire. Par contre, si votre... et que vous mettez en hypothèque, si elle ne vaut que 50 000, vous ne pourrez pas emprunter 100 000. Grosso modo, c'est ça. Donc, une banque en tant que telle aura une force de frappe beaucoup plus grande que la nôtre. Mais ça, c'est parce qu'on est assez tôt dans le monde de la finance décentralisée. Je pense que ça arrivera dans les quelques années où on aura des systèmes sous-collatéralisés. Mais qui dit sous-collatéralisé dit que vous avez une sorte de système, ce qu'on appelle de credit scoring, où on va être capable de dire un tel, il a un bon travail, on sait qui il est, s'il y a un problème et qu'il ne rembourse pas son prêt, on pourra aller le voir, on pourra aller chez lui, faire venir les huissiers de justice, etc. Tout ce que tu veux. Dans le monde de la DeFi, c'est.
Terry : Pas vraiment le cas, même si c'est pseudonyme. DeFi c'était juste finance décentralisée, du coup decentralized finance.
Merlin : DeFi c'est finance décentralisée et en anglais c'est decentralized finance.
Terry : Du coup on continue sur ça et après je vais rebondir, tu disais que c'est pas la même chose, on sait pas justement où les gens Ouais, c'est.
Merlin : Pseudonyme, donc en fait on a des adresses plutôt que des personnes. Et donc en fait, potentiellement on sait pas qui est derrière telle ou telle adresse. Alors c'est possible, c'est pseudonyme, c'est pas anonyme, donc c'est possible de retracer les personnes qui sont derrière ces adresses, mais ça peut être très compliqué, surtout si ces personnes-là en fait prennent beaucoup d'attention, essayent de brouiller des pistes, etc. Mais dans ce monde là du coup c'est très compliqué de créer ce qu'on appelle du credit scoring. Il y a pas mal d'entreprises qui essayent de le faire parce que du coup ça permettra de débloquer en fait cette capacité de faire du prix non collatéralisé ou sous-collatéralisé. On n'y est pas encore, donc nous c'est du surcolatéralisé, ce qui est en fait globalement, quasiment en vrai, ce qui se fait le plus dans la finance traditionnelle. Là on parle de repo market, donc c'est repurchase market, donc ça c'est des marchés qui... qui brassent des trillions à l'année, mais ça c'est pas les marchés de l'utilisateur commun. Je parlais de prêt à la conso, en tant qu'utilisateur généralement on n'a pas à se soucier de ces marchés-là qui sont beaucoup plus gigantesques.
Terry : Ok, donc beaucoup de choses que j'ai envie de disséquer. Ce que j'entends bien dans ce que tu expliques par rapport au fait que vous, vous êtes pour le moment spécialisé sur la partie pré-surcollate et la réalisée, ça veut dire que les gens à qui vous allez prêter, à qui vous allez permettre de prêter en tout cas, c'est des gens qui vont montrer qu'ils ont plus bien, voire le double, après ça dépend les facteurs, entre ce qu'ils empruntent par rapport à ce qu'ils ont en actif. Donc l'analogie avec la maison je pense qu'elle est très bien, c'est quand tu vas emprunter pour un crédit immobilier, derrière t'emprunte pas à une valeur supérieure à celle de ta maison, en général c'est l'inverse, t'emprunte à une valeur un petit peu inférieure, c'est pour ça que t'as un apport aussi. qui permet en cas de pépin à la banque de se dire au pire je vends la maison et comme ça je récupère je récupère mes billes donc là dessus c'est clair ce que je veux essayer de bien comprendre c'est par rapport tu parlais des intermédiaires pour revenir donc les intermédiaires c'est parce que du coup pour une banque entre le fait qu'elle soit capable de prêter de l'argent, il y a aussi pour faire vraiment ça, pour faire cette action de prêt, il y a plein de systèmes derrière qui se mettent en route, et de ce que je comprends c'est que c'est là, vous aussi, vous vous positionnez dans le monde de la crypto et c'est ça que je veux essayer de comprendre le parallèle.
Merlin : Le monde de la blockchain en fait, vraiment ce qu'il faut comprendre c'est que ça permet de désintermédiariser, pourquoi ? Parce qu'en fait, à partir du moment où vous avez un tiers de confiance, il est d'une certaine manière possible de décrire le contrat que vous avez avec ce partenaire sous la forme d'un code et de déployer ce code sur une blockchain. Et en fait, à partir du moment où il est déployé sur cette blockchain, il sera impossible de revenir en arrière et de changer les lignes du contrat, etc. et donc en fait vous passez de je dois faire confiance à des partenaires et du coup payer un autre partenaire pour m'assurer que si ce premier partenaire me fait défaut etc je suis couvert et bien là en fait on est capable de tout écrire dans du code et d'être sûr que c'est exactement ce code là qui va être exécuté s'il y a tel ou tel événement ou facteur qui se passe.
Terry : Yes, donc ça c'est on va dire le postulat de l'un des gros intérêts de la blockchain qui est du coup de désintermédiariser, d'enlever l'intermédiaire. Donc l'exemple c'est quand tu achètes une maison, l'intermédiaire vis-à-vis de l'Etat pour prouver que la maison t'appartient c'est ton notaire. qui va faire les changements d'écriture. Là l'idée c'est du coup de se dire en fait ça c'est codé et c'est codé d'une telle manière que du coup c'est impossible de le modifier quoi puisque tout le monde a... ça c'est vraiment la technologie blockchain. Moi ma question elle portait... c'est vrai qu'elle n'était pas très claire par rapport du coup aux intermédiaires mais c'était plus sur comprendre aujourd'hui dans une banque un exemple d'intermédiaire qui est nécessaire. vraiment quelle est sa fonction et pour montrer ensuite en quoi donc l'un des intérêts du coup de le faire dans le monde des cryptos, l'intérêt c'est que du coup on peut coder cet intermédiaire mais du coup c'est quelle fonction, un exemple de fonction qu'on va devoir coder qui aujourd'hui est rempli par Il va.
Merlin : Y en avoir plein. Il va y avoir ceux qui séquestrent les fonds que l'utilisateur va déposer. Il va y avoir celui qui va pouvoir créer les contrats, ceux qui vont les négocier, etc. Il peut y avoir en fait toute une ribambelle. On va avoir des brokers-dealers, etc. En fait, il y a toute une ribambelle d'intermédiaires. Et leurs valeurs ajoutées, généralement, c'est de... Eux, ils sont experts, soit en Risk Management, ou être Market Maker, etc. Et en fait, ici, on est capable d'automatiser toutes ces tâches, soit totalement. Après, il y a des choses que, par exemple, la gestion du risque, elle ne peut pas être totalement automatisée, c'est impossible, parce que le risque changent en fonction des conditions de marché, il se passe le Covid, tout change, etc. Donc il faut forcément avoir de l'humain derrière, des gens qui vont refaire des calculs, réfléchir un petit peu aux conditions. Donc ça, ça va être très difficile à automatiser, mais tout ce qui est automatisable, en fait, peut être écrit dans du code. Et en fait, après, par exemple Morpho, nous ce qu'on fait, c'est quand vous prêtez ou empruntez, il suffit de cliquer sur une fonction et si vous avez un wallet avec des crypto-monnaies, etc. ça va transférer les tokens, par exemple, sur Morpho. Et donc là, vous avez du collatéral. Maintenant, vous pouvez emprunter parce que votre collatéral a une valeur, etc. Si vous voulez faire ça à une banque, il va falloir venir dire que... Justifier que votre maison, elle vous appartient un bien. Vous allez demander à votre notaire de peut-être vous donner les papiers qui sont manquants. Ensuite, eux, ils vont étudier votre profil. Peut-être que ça va aller un peu plus loin dans la chaîne pour savoir s'ils ont la capacité de prêter, si vous êtes bien dans le profil type avec qui ils peuvent prêter. Et ensuite, après, il va falloir faire les transferts d'argent, etc. Vous pouvez compter en quelques mois ou quelques semaines, mois, ça dépend. Pour avoir un prêt sur Morpho, ça va être en l'espace de quelques secondes.
Terry : Yes, donc très clair là-dessus. Et quand tu disais vous êtes plus du coup vraiment comme l'infrastructure et pas comme une banque, qu'est-ce qui te fait dire ça ? Est-ce que c'est parce qu'en fait il n'y a plus besoin de banque dans le monde de la DeFi, de la decentralized finance ?
Merlin : Ça, moi je ne suis pas aussi on va dire maximaliste dans le sens où, je ne sais pas, ma grand-mère ou mes parents utiliseront toujours leur banque, ça c'est clair. Pourquoi ? Parce que c'est ce qu'ils ont connu, l'expérience utilisateur en vrai elle n'est pas si mal que ça. Il y en a qui s'en fichent d'avoir un truc qui est décentralisé où ils sont souverains de leur monnaie ou qui est plus transparent. ils ont d'autres chats à fouetter, donc je pense qu'il y a tout un pan de la population qui n'ira pas forcément utiliser directement les protocoles de DeFi, donc de finances décentralisées directement.
Terry : Ma question après c'était vraiment dans le monde des cryptos.
Merlin : Ouais.
Terry : Est-ce que dans le monde des cryptos tu vois un monde dans lequel il y aurait l'équivalent des banques qu'on connaît dans le monde actuel ?
Merlin : Ouais, ça ça arrive et on voit des projets qui arrivent où en gros la plus grosse problématique maintenant c'est faire un pont entre la finance décentralisée, donc un peu cette bulle blockchain etc. coupé du monde, et le monde réel où le but après c'est de pouvoir payer son café avec ses cryptos. Donc on voit apparaître des projets où c'est ça, où t'as un wallet, ils font aussi la carte, et le but c'est que Depuis ton wallet, ton argent va être transformé de token à fiat, donc à des euros, des dollars, pour payer ton café. Donc on voit déjà des projets comme ça arriver. Après, il y a des problématiques de distribution, donc il faut avoir un partenariat avec Visa, des trucs comme ça. Il faut aussi que... il y a des sujets de taxes, parce qu'en France on a la flat tax, etc. donc à chaque fois que tu fais un profit, tu as une taxe dessus. Mais qu'en est-il pour des stable coins etc, donc des tokens dont la valeur reste stable au cours du temps et qu'ils ont soit indexé sur le dollar soit l'euro, qui sont très pratiques pour le paiement d'ailleurs, en finance décentralisée on l'utilise pas mal pour payer les employés ou les partenaires. Mais là, après, c'est est-ce que quand je paye mon café, est-ce que je ne suis pas en train de payer des taxes qui sont peut-être plus chères que mon café ? Ça, c'est des vraies questions auxquelles il faut répondre si on veut avoir une réelle adoption et pouvoir se dire, ah tiens, ça marche vraiment comme ma banque.
Terry : Ok, donc clairement, comme tu dis, il y a des ponts qui vont devoir être créés, qui sont en train d'être créés entre les monnaies fiduciaires fiat telles l'euro, dollars et les crypto-monnaies, pour pouvoir aussi, on va dire, augmenter l'usage qui aujourd'hui reste très centré sur les gens qui sont des early adopters, des gens qui sont à fond dans ce monde. Maintenant, c'est comment tu fais pour amener ça au grand public, au marché de masse ? Donc ça c'est clair, vous vous participez à la construction d'une des infrastructures qui va permettre le prêt de crypto entre personnes qui en détiennent. c'est quoi du coup les enjeux techniques pour comprendre, peut-être tu peux remonter en expliquant qu'est ce que c'est qu'un token, qu'une crypto aussi, et les enjeux que vous avez au quotidien, en fait tu parles aussi du staff de l'équipe de Morpho aujourd'hui, 25 personnes principalement de la tech, qu'est ce que ça veut dire du coup ?
Merlin : Qu'est ce qu'on construit exactement ? Alors Comment dire ? Un token, qu'est-ce que c'est ? Donc sur une blockchain, en fait, ça va être grosso modo une sorte de contrat qui dit telle personne a tant de ce token. Donc ça va être juste un nombre. Faut voir ça un peu comme une sorte de base de données. On dit atterri à 100 USDC. Donc l'USDC, c'est un token, un stable coin. dont le prix est indexé sur le dollar, donc il reste un dollar.
Terry : Quand tu parles de stable coins, c'est qu'en fait ils sont indexés sur des monnaies fiat.
Merlin : Voilà, c'est ça. Et donc on va avoir une sorte de mapping, donc on va dire Terry a tant, moi j'ai tant, etc. Et si tu transfères à quelqu'un d'autre, juste le standard dit, quand tu fais un transfert, tu mets à jour la balance du sender et celui du receiver, donc celui qui envoie et qui reçoit les tokens. C'est quasiment aussi simple que ça, et ça vérifie un standard, qu'on appelle ERC20 dans le jargon, mais ça sert à rien d'aller dans les détails. Ça répond à un standard. Et pourquoi il y a un standard ? C'est pour juste que, ensuite, les développeurs dans ce monde-là, quand ils interagissent avec des tokens, ils ont le même nom de fonction, les mêmes paramètres, etc. C'est beaucoup plus simple à gérer. Et il y a plein de standards autres. On a beaucoup parlé des NFT, je pense, dans les médias. Pareil, il y a des standards pour les NFT. Il y en a plein d'autres pour des sujets beaucoup plus techniques. Donc voilà pour la partie token. Après nous du coup, ce qu'on a construit c'est autour des tokens bien sûr, donc ça va être un protocole de préemprunt comme je disais. Les enjeux dans ce monde là c'est qu'on est très orienté open source, donc transparence etc. Donc c'est super bien parce que ça permet d'innover, d'avoir des gens qui vont contribuer aussi, nous aider. On va avoir aussi énormément d'yeux qui vont regarder notre code, donc ça évite les erreurs. Mais par contre c'est à double tranchant, c'est qu'à la fois ça permet d'innover et d'être très très rapide. Mais en même temps, s'il y a la moindre faille, vulnérabilité dans le code, elle peut être exploitée. Et ça c'est un problème parce que... ça. Disons que quand nous, je disais, on a 2,5 milliards qui ont été déposés sur Morpho, directement, ça veut dire qu'il y a 2,5 milliards qui sont, entre guillemets, en jeu. Donc s'il y a la moindre faille et vulnérabilité, quelqu'un, un hacker, pourrait essayer de l'exploiter de manière à récupérer et drain tous les fonds des utilisateurs. Donc il y a un peu une sorte de bataille où il faut que le code soit, en tout cas nous c'est notre philosophie, le plus minimaliste possible, le plus simple possible. Ne pas essayer de réinventer la roue et il y a un gros enjeu de sécurité. Donc là on va faire énormément de tests, on va passer énormément de temps avec des security researchers, donc des chercheurs en sécurité. On va passer des audits, on va faire des compétitions aussi. Donc des compétitions, ça va être des gens qui leur passent le temps, grosso modo, c'est essayer de trouver des failles. et ils vont gagner un prix. Et une fois que le protocole est live, donc il a été déployé, on ne peut plus le changer. Donc il vaut vraiment mettre beaucoup de temps, on passe énormément de temps à être sûr qu'il n'y a aucun problème dans le code. Et une fois que c'est déployé, dans ce cas-là, le seul truc qu'on puisse faire, entre guillemets, c'est déjà veiller et monitorer ce qui se passe sur le protocole pour être sûr qu'il n'y ait pas de problème. Et aussi, généralement, on met ce qu'on appelle des bug bounty, donc on va dire de l'argent en jeu pour que les chercheurs en sécurité, en fait, s'ils trouvent une faille, ils aient plus une incentive aller vers nous et nous dire, ah, j'ai trouvé cette faille, etc. plutôt que de l'exploiter sur le protocole live. Nous, par exemple, on a 500 000 en jeu, ce qui peut représenter énormément par rapport à des bugs bantiques qu'on peut voir dans ce qu'on va dire le web 2, où on parle de quelques milliers généralement. Nous, 500 000, ça paraît énorme. Mais voilà, on compare ça à 2,5 milliards, avec un code qui est totalement open source. Bah en fait, si moi je suis hacker, on peut se poser la question quand même dans sa tête, est-ce que je ferais pas mieux de hacker ce protocole ? Bon, la réponse est évidemment non, parce que vous allez avoir à vos trousses, je sais pas, la CIA, NSA, peut-être, si vous faites ce genre de hack, mais voilà.
Terry : Et du coup quand tu parles de 2,5 milliards 500 milles, les unités R c'est des dollars ? Ouais c'est des dollars. Et du coup pour ce sujet, s'il y a une faille en fait, une fois que c'est live c'est live, comment ça se passe du coup ? Est-ce que vous faites des améliorations j'imagine ?
Merlin : Alors, il y a deux types de protocoles. Il y a les protocoles qu'on appelle upgradables, qui peuvent s'améliorer, s'upgrader, et les protocoles immuables. Nous, on pense qu'on a fait la première version, c'était upgradable. La seconde version est immuable. Immuable, ça veut dire qu'on ne peut plus jamais rien faire. Donc s'il y a la moindre faille, en fait, Là, dans ce cas-là, nous avons ce qu'on appelle incident response plan. Ça veut dire que s'il se passe quelque chose ou qu'on découvre une faille, il faut réagir comme ça. On connaît la liste des intégrateurs, donc ceux qui utilisent notre protocole et des utilisateurs. Pas tous, comme c'est pseudonyme, il y en a plein qu'on connaît pas, mais le but ça va être essayer de, si on trouve quelque chose, ça va être de décontacter et de leur dire attention on a trouvé quelque chose, il faut que vous partiez du protocole ou je ne sais quoi.
Terry : Juste pour faire une pause là-dessus, pour comprendre justement les enjeux qu'il y a autour de ça, si demain tu as une faille qui est découverte, la seule option sur la version immuable du protocole c'est de dire faut que vous partiez, attendez qu'on fasse une nouvelle version et vous reviendrez sur le nouveau protocole.
Merlin : Voilà. Après, c'est possible de déployer un nouveau contrat avec le fixe, avec un patch directement assez rapidement. Ça dépend bien sûr de quelle est l'ampleur de la problématique. Après, voilà, ça peut être aussi des bugs mineurs, dans le sens où ça va être juste l'expérience utilisateur qui va être un peu moins bonne. Dans ce cas-là, ça ne vaut pas le coup de faire bouger tout le monde. Après, sur les protocoles upgradables, dans ce cas-là, c'est possible de changer la logique qui a fait défaut, etc. Donc c'est un peu mieux dans ce cas-là, mais il y a quand même des problématiques avec ça. C'est que, un, du coup, comme c'est plus immuable, c'est plus ce qu'on appelle trustless. Donc ça veut dire que si quelqu'un a la capacité de mettre à jour le code, Il y a bien un tiers de confiance, du coup, d'une certaine manière, ce qu'on essayait d'enlever quand même au début. Donc c'est un peu dommage, même si avec les DAO, etc., donc Decentralized Autonomous Organization, donc ça va être des... Au lieu d'avoir une seule personne ou une entité qui choisit, ça va être un groupe de personnes qui va choisir si oui ou non on met à jour le code. Mais quand même, ça rajoute ça. Et deuxièmement, c'est pas parce qu'on upgrade qu'on fixe tout. on peut réintroduire des bugs, etc. Et généralement, quand c'est upgradable, on va avoir tendance à rajouter plus de features, plus de choses, plus de logiques, qui font que finalement, en fait, on se retrouve avec un code qui est beaucoup plus complexe que quand on part avec un code immuable où on sait très bien qu'on n'a pas trop le droit à l'erreur. Donc voilà.
Terry : Du coup pour rebondir sur ce que tu viens de dire par rapport à la philosophie derrière tout ce qui est web3, blockchain et la logique de décentralisation, tu disais du coup à juste titre que si on part du principe qu'on peut mettre à jour ça veut dire que en tant qu'utilisateur on a ce tiers de confiance en qui on fait confiance qui fera les mises à jour donc on casse un peu cette philo de ne plus avoir besoin du tiers de confiance. modulo ce que tu disais, ce qu'on voit émerger du coup dans ce monde du coup du web 3 qui sont les organisations totalement autonomes décentralisées dans laquelle il n'y a pas vraiment de chef mais que tout le monde peut mettre sa pierre à l'édifice qui est un peu une forme de coopérative dans le monde du web 3. Donc là dessus assez intéressant de voir un peu tous ces enjeux et comment au quotidien du coup d'un point de vue donc vous avez beaucoup de tech à mettre en place parce qu'il y a tout à faire j'entends aussi du coup dans ce que tu dis à l'inverse de ce qu'on peut avoir dans des secteurs beaucoup plus régulés en fait vous avez l'avantage et les inconvénients c'est à dire enfin l'avantage c'est que vous pouvez aller vite tester des choses et les inconvénients du coup c'est que il faut enfin là c'est plus d'un point de vue utilisateur c'est que quand tu vas utiliser ce type de services il faut quand même avoir une certaine confiance dans la boîte qui a créé le service parce que derrière il n'y a pas de tampon d'un état, de tampon d'un organisme indépendant qui vient dire oui oui c'est certifié et tu peux l'utiliser. C'est quoi du coup toi ta vision des choses par rapport à ça aussi sur l'adoption en fait de ces technologies ?
Merlin : Nous, en fait, on passe un temps, ce que je disais, c'est un temps énorme sur l'aspect sécurité. Et je pense que chez Morpho, on a essayé depuis le début de mettre l'accent là-dessus pour essayer de créer une confiance de la part des utilisateurs et devenir un peu une référence en termes de sécurité, de pratique, de code dans ce milieu-là. Et ça, ça met extrêmement longtemps à se mettre en place. Donc maintenant, ça fait deux ans et demi qu'on y est. Et à chaque fois, dès qu'on sort, on va sortir un nouveau protocole. Il faut reprouver à tout le monde que ce protocole-là est sécurisé. Et on a ce qu'on appelle le Lindy Effect, où plus le temps passe, plus les gens ont confiance dans ce protocole et plus ils vont être à même de l'utiliser mais donc en fait il faut arriver à survivre pendant cette période là. Je sais pas si ça répond à ta question.
Terry : Oui alors partiellement c'est à dire que donc là dessus c'est assez clair sur le fait que vous gagnez de la street cred entre guillemets voilà en étant là depuis un moment et puis voilà en montrant que ce que vous avez sorti auparavant ça n'a pas explosé quoi et donc quand vous sortez quelque chose de nouveau les gens vous font plus confiance que vous sortez pas de nulle part. Mais du coup, pour vous, parce que 25 personnes, ça me paraît à la fois beaucoup et pas beaucoup pour faire.
Merlin : Ce que vous faites. Au jour le jour, ce qu'on va faire, c'est qu'on va avoir plusieurs équipes. On va avoir l'équipe protocol, qui va s'occuper du design, etc. Là, sur cet aspect protocole, tu disais qu'on était assez rapide. Pour le coup, on est vraiment très lent sur le protocole. Comme je disais, ça met extrêmement longtemps avant de penser à un design qui fait du sens, qui est hyper simple, mais qui fait ce qu'on a envie de faire. et en même temps qui est hyper sécurisé. Le dernier qu'on a fait, ça a quasiment mis un an, un an et demi. Donc ça peut prendre énormément de temps. Après, on a une équipe qui va être côté off-chain. On a on-chain, c'est ceux qui font le protocole. Off-chain, c'est ceux qui généralement ont des boîtes plus web2. Ça va être les développeurs back-end, front-end, full-stack, etc. Et donc eux, leur but c'est de créer un front-end pour connecter notre interface, l'interface Morpho, avec le protocole pour que les utilisateurs puissent interagir avec le protocole. Donc on va avoir cette équipe-là. Et après, il y a toute une gestion de la donnée, parce que finalement, OK, on a la donnée on-chain, mais si on devait récupérer toute cette donnée et la montrer dans le front-end, ce serait beaucoup trop compliqué, trop long. Et donc, ce qu'on doit faire, c'est répliquer la donnée off-chain. Et donc là, je ne vais pas rentrer dans les détails, mais il y a des solutions qui existent, qui sont plus ou moins décentralisées, et qui permettent donc de récupérer l'état de la blockchain au cours du temps, de tout ce qu'ont fait les utilisateurs, pour que, après l'expérience sur le front-end, c'est vous connecter, vous pouvez voir votre balance, votre position d'emprunt, de prêt, les marchés existants, etc. sur lesquels vous pouvez prêter et emprunter, et ça en quelques millisecondes ou secondes, tout dépend. Donc là, il y a un gros boulot de rendre ces données accessibles à l'utilisateur. Et après, voilà, on a un front-end aussi, on a un produit, donc là, on se rapproche vraiment d'une interface, je pense, de FinTech, même si après, le back-end, c'est une blockchain. Donc, il y a cet aspect-là. Et après, il y a toute une équipe data, growth. Donc, data, ça va être pour potentiellement répondre à des questions pour le côté produit ou même l'équipe protocole qui a besoin de repenser pour le prochain protocole, etc. Là, on va avoir besoin de données et ce qui est assez bien, c'est que on-chain, en fait, toute la donnée est accessible. Donc, on peut aussi faire des... des dashboards, enfin on peut apprendre énormément de la donnée on-chain, donc ça c'est quand même un atout je dirais par rapport au monde traditionnel où la donnée en finance est assez... elle est accessible mais beaucoup moins facilement.
Terry : Ouais donc là c'est enlever cette opacité qu'on peut avoir. Du coup, je viens de réaliser, on n'a pas parlé de la blockchain sur laquelle vous êtes en fait.
Merlin : Alors nous c'est Ethereum, donc c'est une des premières blockchains avec des smart contracts. On est allé sur cette blockchain, pourquoi ? Parce que c'est une des blockchains où il y a le plus de liquidités, donc plus d'argent. Et là on pense du coup aller sur ce qu'on appelle ça des L2, donc en fait ça va être des blockchains qui sont au-dessus d'Ethereum, qui permettent de scaler en fait. Ethereum c'est un peu lent, grosso modo la thèse c'est de maximiser la décentralisation mais du coup ça se fait... comment dire... on va avoir la scalabilité qui en pâtit et les utilisateurs vont payer des frais de transaction qui sont assez élevés, qui sont trop élevés pour des utilisateurs lambda. Par contre sur les L2, là on va avoir les frais de transaction. Donc les frais de transaction c'est par exemple je veux prêter, je veux transférer des tokens, etc. En fait vous payez d'une certaine manière le coût de calcul. C'est un truc qu'on n'a pas en fait dans les... dans le monde web 2, où tout ce qu'on fait, on clique, etc., on s'en fiche, mais derrière, il y a un serveur, et les gens qui font tourner ce serveur, ils payent l'électricité. Dans ce cas-là, en fait, on paye directement, c'est comme si on payait directement ceux qui font tourner ce serveur-là.
Terry : Donc là quand tu dis L2 c'est pour Layer 2, vous êtes en train de le construire ou vous êtes déjà Layer 2 ?
Merlin : Alors nous notre protocole il peut être déployé sur n'importe quel Layer 2, c'est simplement, disons que c'est plus des questions stratégiques sur quel Layer 2 on va, et puis aussi il y a un coût opérationnel, c'est à dire qu'après il faut avoir des équipes pour... Nous le but c'est que notre protocole il se fasse intégrer par d'autres produits, qu'on ait en tout cas des utilisateurs, des prêteurs et des emprunteurs. Donc quand on doit déployer, il faut qu'on ait les deux côtés, c'est une marketplace, donc il faut qu'on ait les deux côtés en même temps qu'ils viennent. Donc à chaque fois qu'on doit faire un déploiement, ça demande des efforts et donc de la bande passante, il nous faut des gens disponibles pour... pour s'occuper de ça et pour bien bootstraper l'instance Morpho qu'on vient de déployer. Et donc c'est pour ça qu'on part pas sur toutes les layers 2 d'un coup.
Terry : Et du coup, si on peut revenir juste sur cette notion de layer 1, layer 2, comme tu l'expliquais, les coûts, donc tu es dans le monde du web 2, effectivement, tu as des coûts qu'on ne voit pas, mais l'électricité des serveurs, la maintenance des serveurs, etc. Dans le cas du coup de la blockchain, puisque on a pu cet intermédiaire, ce Google Cloud, cet AWS, Microsoft, Azure, il faut quand même faire les calculs, et les calculs sont faits de manière répartie sur tous ceux qui fournissent la puissance de calcul. qui a été un moment vachement connu avec les personnes qui faisaient ça pour farmer justement des bitcoins, donc en fait louer leur puissance de calcul. D'où le rush d'achat de cartes graphiques avec des GPU puissants pour permettre de faire plus de calculs. Donc ça le coup c'est clair et du coup ce que je voudrais donc ce que tu dis enfin j'essaie de rephraser c'est qu'Ethereum de base sans layer 2 en fait il va faire tous les calculs nécessaires et donc ça va coûter beaucoup tous les calculs nécessaires à.
Merlin : Cette Ouais c'est que en gros... Oui c'est ça.
Terry : Quand je dis tous les calculs nécessaires je veux dire c'est à dire que vu qu'on a tout l'historique qui est partagé à tout le monde etc il va vraiment tout mettre en oeuvre à chaque fois qu'il y a une transaction et du coup la transaction va revenir beaucoup plus important là où peut-être que parfois tu pourrais aller plus vite et ne pas faire tous les calculs c'est ça ?
Merlin : En fait, après les layers 2, ce qui va être fait en fait, alors il y a plusieurs modèles, mais en fait on va parler par exemple des IK Rollup, donc là on va quand même dans le technique, mais en gros on va utiliser de la cryptographie, qui est assez récente. Et le but ça va être en fait de prendre un paquet de transactions, plutôt que de mettre chaque transaction on-chain. On va prendre un paquet de transactions, on va les mettre ensemble et ensuite on va mettre en gros une preuve cryptographique on-chain. On sait pertinemment que personne n'aura pu la falsifier. Et ça, on va mettre cette preuve là, on-chain, donc sur Ethereum. Et donc en gros, ça nous permet plutôt que d'avoir ces 1000 transactions, en fait elles vont payer le coût d'une seule transaction. Et donc on va diviser par 1000 ou je ne sais quoi le prix que vous auriez payé en allant directement sur Ethereum.
Terry : Et du coup si je rephrase ce que tu dis, et pour compléter ce que je disais, en fait la logic layer 2 ce n'est pas de faire juste qu'une partie du travail, c'est de le faire de manière groupée, en utilisant du coup des nouvelles, la pointe des technos cryptographiques qui te permettent de grouper toute une série de tâches dans une seule, dans un seul processing, plus ou moins un seul en tout cas, un processing qui va coûter moins cher que si ces tâches-là étaient demandées de manière indépendante. mais derrière tu continues à vraiment tout partager, à vraiment avoir cette logique qu'on a sur la blockchain qui est de tout historiser.
Merlin : Disons que l'historique... Après, en fait, Ethereum a pour vocation de devenir une sorte de... Comment dire ? On appelle ça settlement layer, de couche de settlement, où une fois que ta transaction qui est passée sur une L2, la preuve a été poussée sur la L1, donc Ethereum. À ce moment-là, on sait que la transaction a été incluse et donc il y a settlement. Pour titre de comparaison, settlement en finances traditionnelles, ça peut être un jour, deux jours, voire plus. Là, on peut parler d'heures, voire minutes. C'est quand même pas mal. Mais ça reste encore, disons que c'est assez récent comme technologie, et c'est pour ça qu'on prend notre temps en tout cas pour étudier et savoir sur laquelle on va aller.
Terry : Ok. Du coup, pour peut-être sortir un peu de... prendre de l'auteur et sortir un peu du technique où on est allé là, si on revient sur la question de centralisation, décentralisation, dans le monde vraiment purement crypto-monnaie, on a tendance à voir, enfin, l'intérêt de la décentralisation, on ne va pas le répéter. En revanche, dans les usages, on a entendu parler de Binance, on a entendu parler... enfin il y a Coinbase, il y a des marketplaces qui existent pour permettre aux personnes de s'échanger leurs cryptos, et du coup au final tu as cet organisme qui arrive au milieu, qui est du coup centralisateur, puisque en fait il sait ce qu'on travaille, et donc dans vraiment l'usage purement en cryptomonnaie, entre la promesse de se dire on décentralise tout et ceux qu'on voit qui émergent et qui arrivent à faire du business, on se dit en fait est-ce qu'ils ne sont pas en train de juste refaire ce qu'on a déjà dans le monde actuel ou dans le Web2 et de revenir demain les Google, Amazon...
Merlin : C'est un très bon point. C'est pour ça que je pense qu'après nous en tant qu'industrie et on va dire membre du secteur finance décentralisé, on a un gros travail à faire sur l'expérience utilisateur, sur comment on-board les gens et rendre facile l'utilisation. Parce que pour l'instant, il n'y a encore que les nerds, ou alors les gens qui veulent de la facilité, ils vont utiliser Coinbase ou Binance, etc. Donc c'est à nous, je pense, membres de ce secteur-là, d'essayer de pousser l'adoption en essayant d'améliorer l'expérience utilisateur, etc. Après, ce que je disais au tout début, c'est que je sais pertinemment que certains utilisateurs ne bougeront même pas forcément de leur banque, continueront d'utiliser. Après dans ce cas-là, le but c'est que plutôt que la banque utilise 15 intermédiaires ou que Coinbase utilise leur propre infra, en fait derrière ils utilisent Morpho. et comme ça ils enlèvent 5 intermédiaires et on se retrouve avec plus que Morpho en back-end et peut-être un autre. Et déjà là on réduit drastiquement le nombre d'acteurs et aussi on augmente drastiquement la transparence du milieu, ce qui est quand même un très gros objectif en soi. Et après, il y en a qui demanderont de toute manière, je pense, un côté décentralisation, souveraineté. Et généralement... Comment dire ? Après, l'humain se rend compte que de ces valeurs-là, que quand il en a besoin. Donc, quand soit la banque ne fonctionne pas, qu'il y a des pays où le système bancaire... Nous, en Europe, on a quand même de la chance où le système bancaire fonctionne quand même très bien, donc c'est pour ça que je pense qu'on a aussi moins le... comment dire... d'intérêt direct à utiliser ça. Mais dans certains pays, en fait, le système bancaire est cassé, ou alors il y a une inflation énorme, Dans ce cas-là, leur seule solution, c'est de se tourner vers des cryptos pour pouvoir maintenir et garder leur pouvoir d'achat. Alors généralement, ils se tournent vers des plateformes comme Binance, que tu mentionnais, parce que l'expérience utilisateur, elle est bien en fait, tout simplement, elle est super simple. Après voilà, dans certains pays en fait c'est pas accessible non plus pour des raisons régulatoires etc. Donc ils vont utiliser des wallets directement. Et après de plus en plus on voit aussi des gens qui partent des centralized exchanges comme Coinbase et Binance. pour aller dans le monde crypto. Pourquoi ? Parce que plus d'opportunités, moins de frais et bon après décentralisation mais il y a beaucoup de points. Et après aussi ce qui peut faire peur c'est un peu les sujets comme FTX etc. où là on s'est rendu compte que certains Centralized Exchange, comme tu dis, ils reproduisent exactement ce contre quoi on se bat. Donc refaire des banques où il y a des magouilles de la corruption, etc. Et ça on aimerait bien l'éviter quand même.
Terry : Et du coup, pour toi, pour Morpho, c'est quoi pour toi les prochains jeux en jeu sur les deux années qui viennent, même sur l'année qui vient ?
Merlin : Alors nous, on a récemment sorti notre dernière version qui s'appelle Morpho Blue. Donc là, il y a 800 millions quasiment dessus. Donc là, l'enjeu, ça va être justement d'aller sur DL2. et essayer de viser l'adoption, l'adoption avec des intégrateurs plus tradfile parce que maintenant on va dire qu'on est assez développé dans le monde de la DeFi, on est un des plus gros protocoles de préemprunt en fait au monde. Donc le monde DeFi on le connaît bien, et là maintenant notre but c'est de parler avec des institutions, pardon, des entités institutionnelles, des partenaires, je mentionnais Revolut, etc. Donc ça c'est des... ou même des banques en fait, on parle à des banques et le but c'est d'aller les voir et essayer de comprendre quels sont les enjeux parce que eux ils sont aussi intéressés par ces technologies parce que ça peut leur permettre de réduire énormément leur coût parce que moins d'intermédiaires. Et donc le but après c'est de se faire intégrer par eux, parce que nous ce serait super cool que dans trois ans on ait Lydia qui dans le back-end utilise Morpho. Donc ça c'est le but et il faut commencer dès maintenant à leur parler parce qu'il faut créer la relation. Ça met énormément de temps comme je parlais de l'indie effect, de créer de créer de la confiance, etc. Donc ça, on y travaille. Mais ça va être un travail de longue haleine parce qu'on parle aussi avec des acteurs qui ont des timelines qui ne sont pas du tout les nôtres. Dans le sens où nous, on est une startup et il va falloir qu'on devienne profitable, rentable assez tôt. On a une quantité, on va dire, fixée de cash. Et eux, ils peuvent réfléchir sur des années, voire dizaines d'années pour certains, comme les banques. Et donc voilà, ça c'est un truc sur un sujet où il ne faut pas non plus se faire trop avoir, dans le sens où attendre trop d'eux, potentiellement peut être néfaste pour nous.
Terry : Yes, c'est tout l'enjeu des startups. Et du coup, avant d'aller sur mes questions de la fin, est-ce qu'il y a un point en particulier que tu voudrais préciser, compléter, un sujet qu'on n'a pas abordé ?
Merlin : Moi j'ai un sujet, c'est un peu, je trouve que dans les médias, ceux qui parlent de crypto etc, je trouve qu'on est assez mal défendu. Dans le sens où on va toujours parler de spéculation, de prix du bitcoin, ou alors FTX, etc. Mais en fait derrière il y a beaucoup d'acteurs. Alors nous on est quand même dans la finance décentralisée, mais le but c'est quand même de rendre ce système, la finance transparente, plus résiliente. plus efficace. Et après, il y a plein d'expériences, d'expérimentations avec les DAO, comment essayer de gérer des projets de manière plus, je ne sais pas comment dire, égalitaire ou en tout cas moins centralisée. comment essayer de créer des réseaux sociaux où il n'y a pas qu'une seule entité qui choisit quel contenu on doit regarder, on doit lire, etc. Écoutez. Et en fait, ça, on en parle très très peu. Je trouve ça super dommage alors que le... Le web tel qu'on le connaît maintenant est quand même hyper centralisé, hyper fermé, et il n'y a plus d'entreprises qui se construisent sur Facebook ou sur Twitter, etc. Pourquoi ? Parce que leurs API sont fermées, ou du jour au lendemain on peut vous couper les vivres, Google Ads, on a décidé que votre boulot maintenant ça ne valait plus coup, vous n'avez plus le droit. et du jour au lendemain, en fait, votre boulot, votre boîte, elle peut couler, quoi. Et avec ce monde-là, en fait, juste la donnée, elle est accessible. Il n'y a pas moyen de bloquer. Et je pense que ça peut apporter énormément de renouveau, en fait, dans Internet, d'innovation et puis de créativité, quoi. Donc voilà, on n'en parle pas assez, quoi.
Terry : Hyper intéressant, du coup faut qu'on allez regarder ce qui se fait au delà de ce qu'on lit dans la presse mainstream, parce qu'effectivement il y a des projets hyper intéressants avec derrière des vraies valeurs ou en tout cas des vraies idéaux qui, sans parler de plus d'État, plus de nations et tout est décentralisé, il y a un intermédiaire où il y a des gens qui essayent de faire bouger les lignes, comme tu dis, sur des projets hyper intéressants. Donc message entendu et merci pour ce partage et du coup pour aller vers mes deux dernières questions donc la première c'est est-ce que tu as une conviction forte avec laquelle en général tu es en désaccord avec tes pairs ?
Merlin : Je sais pas si c'est une conviction mais je pense que en vrai on... on ne pousse pas assez les gens, c'est peut-être un peu bateau, mais à croire en eux à l'école en fait, au moment de l'école. Et je pense que l'éducation comme on la voit actuellement, est plus du tout adaptée, et même n'a pas forcément été adaptée à comment... En tout cas, à faire en sorte que les gens trouvent un peu leur voix et de la valeur dans ce qu'ils font. À chaque fois, on leur dit, il faut apprendre ça. Mais en fait, on n'explique jamais le pourquoi du comment. On n'apprend pas à savoir ce qu'on veut vraiment faire et ça prend énormément de temps. Moi, ça m'a pris énormément de temps à essayer de trouver ce que je voulais vraiment faire. Et je pense qu'on devrait passer beaucoup plus de temps à l'école, mais même au plus jeune âge, à essayer de pousser les gens à aller explorer des choses plutôt que de les contraindre. Donc c'est peut-être hyper bateau. Non, c'est intéressant. Mais je pense que si on a un enfant qui adore, qui est passionné par quelque chose, il faut surtout le pousser là-dedans et pas le réfréner. Parce que c'est un peu le moment où on est un peu... Il y a une sorte d'obsession et de... C'est le moment où... Ouais, l'obsession, c'est un peu la détermination mélangée à de la curiosité. Et c'est le moment où, en fait, on va apprendre un maximum de choses en très très peu de temps. Et quand on atteint ce point-là, en fait, on est imbattable. On peut apprendre n'importe quoi en très peu de temps et personne ne va être capable de nous arriver à la cheville. Et je pense qu'on ne passe pas assez de temps à croire dans les enfants en leur disant « si, si, c'est possible en fait, continue ». Et au pire, peut-être que ça ne donnera rien, mais je suis persuadé qu'après on peut récolter des fruits et de l'expérience là-dedans. Je pense qu'il y a beaucoup de choses qui se jouent pendant l'enfance et il faut juste pousser les gens à essayer d'explorer ce qu'ils aiment vraiment.
Terry : Top, merci pour ce partage et du coup la dernière question c'est quelles sont les choses qui te nourrissent toi intellectuellement ? Comment tu t'inspires au delà ?
Merlin : Moi j'aime bien, un truc que j'aime bien c'est je crois lire des bouquins mais sur des sujets dont je partage pas trop les... Je suis pas en accord. Donc ça va être en fait... Généralement c'est les bouquins qui me font le plus réfléchir parce qu'en fait je sais que je suis pas vraiment... Je sais pas, admettons, c'est sur le capitalisme ou j'en sais rien ou des trucs comme ça, des sujets où... Ça, ça va me faire vachement réfléchir. Et généralement, en fait, après avoir lu un bouquin comme ça, je ressors toujours après avec d'autres idées ou en tout cas une autre manière de penser et de voir ce sujet. Et je trouve que c'est une des meilleures manières de réfléchir, parce que la plupart du temps on fait l'inverse, c'est-à-dire qu'on aime un sujet, on va prendre tous les bouquins qui vont, en tout cas dans notre thèse, et du coup ça juste renforce notre pensée vers cette vision-là, alors qu'on apprendrait peut-être beaucoup plus, on serait peut-être plus ouvert d'esprit si on essayait, on se force un petit peu d'explorer des bouquins qui remettent un peu en cause notre façon de penser.
Terry : Je trouve ça hyper intéressant, c'est l'antithèse des réseaux sociaux du coup évidemment, parce que les réseaux sociaux ils te ferment dans tes cercles pour t'auto-conforter, mais hyper intéressant et complètement challenger ses propres idées, c'est comme ça qu'on progresse. Ben merci pour tous ces partages, c'était un épisode qui était très technique. Ouais, j'espère que ça va pas être trop dur. Après c'était fin de journée donc j'étais fatigué donc j'espère que les questions elles ont quand même permis, même si elles étaient naïves pour des gens qui viennent de ce milieu, peut-être que pour d'autres comme moi qui sont plus extérieurs ça permettra aussi de mieux comprendre. Moi je pense que je pourrais même le réécouter. Mais en tout cas merci pour tous ces partages et puis du coup, longue vie à Morpho et à toute l'équipe.
Merlin : Merci beaucoup et en tout cas merci d'être venu Terry.