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Dounia Hamza, Les secrets d’une transformation digitale réussie

Épisode #64 | Publié le 17 avril 2024

Dounia Hamza

Dounia Hamza est coach produit, facilitatrice et formatrice.

Elle a 20 ans d’expériences en design de services, product management et transformation digitale.

Dans ce nouvel épisode de Just a Click, elle vient nous partager son retour d’expérience sur la culture produit dans les grands groupes en pleine transformation et son rôle en tant que coach.

Nous discutons également des ponts que l’on peut faire entre le monde des scale-ups et celui des grands groupes.

C’est un épisode sans langue de bois, dans lequel vous découvrirez (entre autres) :

  • Des retours d’expérience sur une transformation agile à grande échelle chez Orange.
  • Comment insuffler concrètement la culture produit.
  • L’intérêt du design thinking et de l’intelligence collective.

Ressources :

  • Le livre « Gamestorming » de James Macanufo et Sunni Brown
  • Le livre « Les Maîtres de la manipulation » de David Colon

Bonne écoute !

Transcription de l'épisode : "Dounia Hamza, Les secrets d’une transformation digitale réussie"

Terry : Salut Dounia.

Dounia : Salut Terry.

Terry : Merci de prendre du temps aujourd'hui pour parler d'Orga Produits, de Transfaux dans les grands groupes et les ponts entre ce monde-là et le monde notamment des scale-up, puisqu'on a pu en discuter en off et je trouve qu'il y a pas mal de liens à faire entre ces deux mondes pour pouvoir aussi capitaliser sur du retour d'expérience de ces deux mondes. Et donc voilà, ça va être la thématique de notre échange. Et avant de rentrer dans le vif du sujet, je te propose de te présenter.

Dounia : Merci pour l'invitation. Je suis Dounia, je suis coach produit, facilitatrice et formatrice et aussi membre de Fluho, c'est un collectif d'experts produits qui accompagne les entreprises dans la création et l'optimisation de leurs horaires produits. Moi, ça fait 20 ans que je travaille dans le Product Management et la Transfo, et j'ai pas mal évolué dans le conseil et le monde des ESN, ce qui m'a permis de faire à la fois des missions stratégiques, comme de la veille, des études d'opportunités, mais aussi des missions plus opérationnelles, comme occuper des rôles de PO, de PM, de responsable produit. Et puis, avec le temps, je me suis aussi intéressée à tout ce qui est approche design, type design thinking, design sprint, intelligence collective. Et en fait, j'ai voulu mettre toutes ces expériences et ces expertises au service des équipes et des co-leaders. Et c'est pour ça que je suis devenue coach et facilitatrice. J'ai aussi travaillé aussi bien dans des grandes structures, des secteurs aussi divers, mais aussi j'ai accompagné des entrepreneurs et aussi des start-up early stage.

Terry : Ok, très clair. Du coup, pour commencer, si tu devais, pour toi, un peu définir ce que ça veut dire qu'être une organisation, enfin, pas définir, mais pour toi, qu'est-ce que c'est qu'une organisation en transformation digitale ? Ce qu'on peut entendre beaucoup, justement, dans l'univers des grands groupes. Et au-delà de qu'est-ce que c'est, les plus gros enjeux, en fait, qui viennent régulièrement, lorsque tu as des organisations comme ça, qui se disent, ben là, on veut porter une transformation digitale pour être plus agile, pour être capable de mieux répondre à un marché qui évolue toujours plus vite. C'est souvent les mots qu'on peut entendre.

Dounia : Dans différents grands groupes. En fait, ce que j'ai pu constater, je vais parler d'un client qui me vient tout de suite à l'esprit, qui est Orange. un opérateur que tout le monde connaît, qui a commencé sa transfo agile à l'échelle en 2019, et ça a impacté des milliers de collaborateurs. Moi, j'ai pas mal travaillé au sein de cet opérateur. Et j'ai vraiment vu la différence, pour moi si tu veux, la culture produit par rapport à la culture projet, qui s'illustre déjà par le fait que finalement on pilotait du développement produit-service en mode projet avant, c'est-à-dire qu'en gros on avait un périmètre défini, un budget, des délais. En gros, les instances type copil, coproche, c'était des instances qui permettaient finalement de suivre ces projets, s'assurer qu'on allait avoir des livrables en temps et en heure. Et finalement, les résultats, on pouvait les constater qu'à posteriori. En gros, est-ce qu'on avait atteint les KPI ou pas ?

Terry : Copile, éco-proche, comité de pilotage, comité de projet, vocabulaire peut-être moins familier pour l'univers start-up.

Dounia : Exactement, donc là c'était vraiment le mode projet. Là dans la culture produit, ce que j'ai pu constaté. Clairement, aujourd'hui, typiquement chez Orange, il y a vraiment un pilotage de la valeur et ça, ça s'illustre à plusieurs niveaux. Déjà, la manière dont les activités de l'entreprise sont organisées. Donc qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire finalement que la manière dont les activités de l'entreprise sont organisées, elles le sont à travers ce qu'on appelle des chaînes de valeurs. C'est issu du framework SAFE, donc d'agilité à grande échelle, mais qui a été Mais en gros, ça va être un ensemble de business owners, d'IT, de personnes de la finance ou du juridique, par exemple, qui vont tous travailler ensemble pour délivrer de la valeur pour l'entreprise et les utilisateurs. Déjà, au niveau de l'orga, Il y a un gros changement puisqu'on est orienté utilisateur et entreprise, valeur. Ça c'est le premier point. Le deuxième point c'est que du coup les instances, tout à l'heure je parlais de Copil, Coproj, où on suivait les budgets, les délais, les livrables, les risques projets. Là, on va être sur des instances, donc des collectifs, où ces collectifs vont s'assurer que la stratégie de l'entreprise et les initiatives qui sont développées par ces chaînes de valeur soient bien alignées. Ça, c'est le premier point. Ces initiatives vont être priorisées par la valeur. Et ces initiatives-là vont donner des features qui elles-mêmes vont être priorisées par la valeur. Donc ça, ça va être au sein des équipes produits. Donc déjà, il y a l'organisation, les instances, et puis la manière aussi dont les gens travaillent et font du produit. Donc la manière dont les gens travaillent, ça va être tout l'aspect collaboratif. Des gens de l'IT, du produit, des data analysts, des UX designers, etc. qui vont travailler main dans la main pour se focaliser sur les besoins utilisateurs et les objectifs de l'entreprise. Donc voilà déjà un gros changement qui s'est opéré.

Terry : Hyper claire là-dessus. Du coup, toi, quels ont été, par rapport à tes missions, notamment du Couché Orange, les plus gros challenges que tu as pu rencontrer lors de ce processus de transformation ? Si là, avec le recul, maintenant, tu regardes un peu derrière, tu te dis Ça, c'est vrai qu'on a fini par réussir à le surmonter, mais on a beaucoup appris parce que ça, c'était compliqué, versus aussi d'autres apprentissages assez marquants qui te restent encore aujourd'hui, de choses qui ont pu bien fonctionner, que tu as pu voir bien fonctionner, et du coup que tu essaies de répliquer aujourd'hui, du retour d'expérience à partager là-dessus.

Dounia : Oui. Alors sur les choses, on peut commencer sur des choses, comme tu disais, de challenge ou de choses un petit peu plus compliquées. Ça va être le fait de faire comprendre aux équipes la valeur ajoutée, je dis bien ajoutée, de travailler de manière collaborative. Et ça, dès le début, donc je parle vraiment du niveau initiative. Donc le niveau initiative, c'est pour donner un exemple, par rapport à une feature, c'est finalement je vais refondre un site parce que je pense que ça va permettre d'accroître l'ECA. Donc là, on a un niveau gros sujet. Les équipes, en fait, même si elles perçoivent la valeur de travailler ensemble, elles se disent dès le début que finalement, travailler de manière collaborative, ça va être peut-être... ça va leur demander beaucoup de bandes passantes. et donc la grande difficulté c'est de réussir à faire travailler les gens ensemble pour leur faire comprendre que finalement si dès le début on se met autour de la table on va pouvoir s'aligner tout le long finalement de cette réflexion des initiatives et donc quand on s'aligne le plus tôt possible ça dissipe tous les doutes, les problèmes de compréhension Ça permet également d'identifier plutôt des dépendances éventuelles, voire les impacts, quand je dis les impacts, les impacts IT ou les impacts humains. Et en plus, ça crée un peu un sentiment finalement d'équipe et plus d'engagement. Et ça c'est vrai que c'est difficile de le faire comprendre tout de suite, parce que les équipes en fait elles sont un peu prises par leur quotidien, le run, et leur dire ok on va devoir peut-être dégager X heures par semaine ou toutes les X semaines, c'est quand même du temps qu'on leur demande. Et ça c'est une difficulté, nous en tant que coach que j'ai eu et que mes pères ont eu, réussir à mobiliser les gens même s'il y a de la valeur. Donc pour un petit peu les petits tips pour réussir à A trouver ce temps-là, ce qu'on faisait, c'était beaucoup de REX. Faire venir, par exemple, des gens qu'on a accompagnés. Je pense à des REX que j'ai pu faire. J'ai mis en place des design sprints pour, par exemple, refondre des parcours utilisateurs en l'espace de quelques ateliers, ou redesigner un site internet en mode design sprint, en l'espace de quelques ateliers, faire en sorte que l'équipe produise des macrozoning, on va dire. Ça, quand tu fais venir les gens qui vont parler eux-mêmes de leur expérience en tant qu'équipe qui est passée par là, tout de suite, ça a plus de valeur que toi en tant que coach qui va, entre guillemets, expliquer aux gens finalement que c'est super la culture produit. Ça, ça fonctionne vraiment bien.

Terry : Juste pour rebondir, j'ai en tête un épisode avec Bastien qui, en tant que coach agile à l'époque, c'était il me semble chez Radio France quand on avait fait l'enregistrement, il me disait que lui ce qu'il aimait faire aussi dans cette logique de demander aux équipes de partager du retour d'expérience, c'était de faire venir aussi des anciennes équipes avec lesquelles il a pu travailler et qui avaient des choses à partager du coup et vraiment les faire rencontrer ces anciennes équipes dans d'autres boîtes avec les nouvelles équipes dans lesquelles qu'il accompagnait aujourd'hui pour justement qu'il y ait ce partage aussi d'informations informelles et qui assoie beaucoup plus la légitimité de l'approche et qui permet aux gens ensuite effectivement de se convaincre même plutôt que d'avoir un peu le coach sachant expliquer les choses.

Dounia : Complètement voilà il ya ça aussi par rapport peut-être à d'autres des points après.

Terry : Tu vois que ça peut être aussi des points qui ont bien fonctionné justement des choses tu dis aujourd'hui ça ça enfin on ne s'y attendait pas peut-être mais ça au final ça c'est ça s'est vraiment bien passé et ça continue à bien fonctionner sur sur sur toujours des retours d'expérience que tu as pu avoir est-ce qu'il ya des choses comme ça qui deviennent en tête aujourd'hui tu essaies de répliquer auprès des clients que.

Dounia : Tu accompagnes Alors oui, peut-être qu'il faut redonner un peu de contexte. Je parlais tout à l'heure notamment d'Orange qui avait mis en place cette transfo avec cette constitution de chaîne de valeur. Et en fait, il y a ces instances issues du framework safe qui sont les LPM, donc ces instances qui priorisent les initiatives, qui s'assurent qu'il y ait bien un alignement avec la strat. Au sein de ces instances, on va demander aux équipes de travailler sur des initiatives et nous, en tant que coach, on va aider les équipes à faire maturer les initiatives. explorer la valeur à tous les niveaux, s'assurer finalement que les équipes se posent les bonnes questions à chaque fois, donc on creuse le pourquoi, on peut titiller à chaque fois, ok tu veux faire cette initiative, ok pourquoi tu veux la faire finalement, elle contribue à quelle ambition de la chaîne de valeur, elle contribue à quel OKR, Ok, admettons, la personne va te dire que ça permet d'adresser le point du chiffre d'affaires. C'est bien, mais côté client, est-ce qu'on résout des problèmes ? Si oui, lesquels ? Est-ce qu'on a des débits, des inputs concrets ? Et donc, en fait, toute cette partie qui est finalement un peu de challenger le pourquoi, nous, en tant que coach, c'est le job qu'on avait. Et ça, ça fonctionnait bien, c'est-à-dire que le fait, dès le début, d'aider des équipes pluridisciplinaires, comme je le disais, on travaille avec des équipes où on va avoir aussi bien des PO, des PM, des product designers, des gens de l'IT, et ça peut être aussi bien à un niveau C-level qu'à un niveau équipe, PO, PM. Le fait, en fait, d'accompagner ces équipes, de les aider à clarifier le pourquoi dès le début, ça, pour moi, c'est un élément clé, parce que finalement, comme je le disais tout à l'heure, tu alignes dès le début, et ça, ça avait de la valeur, et souvent, dans les retours, parce que, du coup, on faisait pas mal de sondages post-accompagnement d'équipe, ce qui revenait, c'était ça. Finalement, dès le début, nous aider à structurer la réflexion, à se poser les bonnes questions, ça nous a permis de nous aligner. Et donc l'alignement, c'est quoi concrètement ? C'est un gain de temps. C'est un gain de temps dans la prise de décision. Et comme je le disais aussi tout à l'heure, t'évites finalement des conversations que t'auras peut-être X semaines ou X mois après, parce que finalement, tu te rends compte que les objectifs du projet ne sont pas hyper clairs. Là, le fait de creuser le pourquoi dès le début, t'as craqué tous ces points.

Terry : Et du coup quand il y a cette recherche vraiment du pourquoi, est-ce que tu as eu ces retours ou en fait derrière tu as aussi les équipes qui vont le challenger ce pourquoi ? C'est-à-dire que tu vas avoir la partie stratégique décisionnaire qui va dire on le fait parce que ça, et quand ça arrive aux équipes qui sont plus dans l'opérationnel, bien qu'elles comprennent le pourquoi, elles se disent ça reste pas pertinent par rapport à la réalité de ce que nous on voit sur le métier. Est-ce que c'est des cas que tu as pu expérimenter ? Et si oui, comment tu les as approchés ?

Dounia : Alors hyper intéressant parce qu'effectivement là ce que je te décris on va dire c'est une vision top d'un, c'est-à-dire, on va dire toujours dans ce framework à nouveau qui a été adapté, tu as effectivement une strat, en découlent des initiatives, nous en tant que coach, on aide à bien clarifier le pourquoi, puis après voilà la valeur, bref ça passe dans cette instance qui finalement après va prioriser les initiatives. et ça donne des macrofeatures que les équipes opérationnelles vont affiner pour faire un backlog de features. Mais ce qui est hyper intéressant dans cette expérience au sein d'Orange, et pour moi ça c'est aussi une des réussites par rapport à ta question de tout à l'heure, C'est tout à fait ça. C'est qu'il n'y a pas que cette exploration de la valeur en top-down, mais aussi en bottom-up. C'est-à-dire que les équipes opérationnelles, certes, quand ces sujets retombent dans les équipes, elles, elles vont affiner, elles vont prioriser. Et en fonction des éléments qu'elles ont, elles sont en mesure de de dire oui ça c'est pertinent et on priorise ça je sais pas pour tel sprint, mais aussi en fait elles-mêmes elles ne vont pas juste faire du delivery de ce qui a été décidé au-dessus, mais elles ont la possibilité de prendre elles-mêmes des initiatives et d'explorer la valeur à leur niveau. Concrètement, qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que l'équipe opérationnelle, au-delà de de mettre en place ce qui a été fixé au niveau initiative, elles vont soit sur la base de retours clients, donc les retours clients c'est par exemple des sondages NPS, ce genre de choses, des avis utilisateurs, des études qui auraient été faites par des études marketing, des interviews utilisateurs. tout simplement la data ou un sujet sur lequel les concurrents auraient travaillé, ou bien un KPI qui est un peu dans le rouge. En fait, sur cette base-là, ça va être l'élément déclencheur pour elle-même se dire on va faire du discovery, on va prendre le temps de réfléchir finalement. Et donc elles ont un temps dédié et c'est en ce sens que c'est hyper intéressant. Donc voilà, dans le framework safe, en fait, tu as des PIs, des instances, bref, agiles. Et là en fait, ces équipes-là, Elles ont sur ce temps-là un temps alloué pour faire du discovery et elles ont cette capacité du coup d'elles-mêmes d'explorer des problèmes utilisateurs et de proposer des solutions. Donc c'est pas que du top-down puisque ces équipes, elles peuvent, comme vous le disiez tout à l'heure, challenger mais aussi être à l'origine elles-mêmes de propositions de valeur.

Terry : Très très clair et du coup tu as parlé à plusieurs reprises donc de safe. Moi c'est vrai que maintenant j'essaie de faire des épisodes où j'essaie de déconnecter des frameworks pour autant comme tu le dis il faut les adapter donc là tu parlais à chaque fois de framework adapté et tu l'as répété à plusieurs reprises. Je suis curieux quand même de connaître ton approche enfin ta vision là dessus notamment dans le contexte grand groupe parce que c'est vrai que quand on est une toute petite boîte pour moi c'est une erreur de s'enfermer sur un framework parce que la valeur d'une petite structure c'est justement d'être capable de ne pas avoir à à tout structurer puisqu'on est tellement petit qu'on peut tous avancer très très vite et itérer très vite. En revanche, quand on commence à atteindre un volume de salariés, de personnes qui travaillent et qui se comptent en plusieurs milliers, il faut en général mettre un cadre, même si ce cadre doit être ensuite adapté. Je suis curieux de connaître ta vision vis-à-vis des différents frameworks qui peuvent être utilisés dans le monde plus corporate. en tant que coach et ce que tu as pu voir qui fonctionnait versus les choses qu'il faut éviter de répliquer comme erreur qui peuvent être courantes dans ce genre de mise en place.

Dounia : Oui, alors voilà, moi tout à l'heure, c'est pour ça que je parlais d'adaptation, j'étais obligée de donner le nom, parce que le wording que j'ai utilisé, voilà, il vient de ce framework, c'est pas moi qui l'ai inventé, et il a été mis en place, donc tu vois, les PIs, ce genre de choses, ces instances qu'on appelle LPM, ces notions de chaîne de valeur, donc il fallait bien que je rende à César. Donc voilà, mais effectivement, elles ont été.

Terry : Adaptées... — Pardon, juste pour qu'on détaille juste ces deux acronymes. Donc les PI, c'est Product Increment, si je dis pas de bêtises, qui se retrouve, je crois, c'est tous les 4.

Dounia : Mois ou tous les trimestres. — Ouais, à peu près, ouais, tous les trimestres.

Terry : — Pour faire des points sur l'avancée, justement, des incréments.

Dounia : — Mais tu vois, les équipes qui vont pouvoir aussi... C'est là que tu vas pouvoir partager ce que tu comptes faire sur le trimestre, voir les dépendances avec les autres équipes.

Terry : L'autre dont tu parlais, le LPM ?

Dounia : LPM, c'est Lean Portfolio Management, et en fait c'est ces fameuses instances que je décrivais au début sans donner nom, qui étaient de dire voilà quand tu me demandais la culture produit dans un grand groupe, ça c'est des instances qui vont en fait s'assurer que les initiatives, donc le niveau initiative, donc vraiment le niveau juste en dessous de la strata de l'entreprise, c'est bien aligné avec la stratégie et qu'on priorise bien par la valeur. Et donc voilà, moi j'ai accompagné ce genre de collectif, donc à ce niveau-là surtout. Et donc oui, pour répondre à ta question sur les frameworks, Voilà. Moi, justement, j'ai pas une approche dogmatique des choses. Je pense que, bien évidemment, un groupe de milliers de personnes qui veut se transformer à grande échelle, Forcément, il est obligé de structurer son activité et il va s'appuyer sur des frameworks. Donc là, en l'occurrence, il y a beaucoup d'entreprises qui vont s'appuyer sur SAFE et ça va être décrié si tu entends Marty Kagan parler de SAFE. Il te dira d'ailleurs son accroche c'est les grands groupes comme Google ou autres ne font pas du safe tu vois. Après voilà moi j'ai pas envie d'avoir une approche dogmatique moi je veux pas rentrer dans le sujet du framework c'est plutôt Moi, mon expérience au sein d'un grand groupe qui a mis en place et qui a adapté ce framework, les choses que moi j'ai trouvées intéressantes. Et donc les choses intéressantes, typiquement, c'était ça. C'était le fait que, finalement, dans ce que, en tout cas, par exemple, Orange essayait de faire au niveau de la transfo, qu'on avait cette exploration de la valeur qui se faisait à tous les niveaux, notamment bottom-up. Le fait qu'il y ait des instances qui priorisent par la valeur et qu'on arrête d'être sur ce mode projet. Et d'ailleurs, une adaptation par exemple d'Orange, c'est d'avoir fait cohabiter des EPIC, donc les EPIC c'est un wording agile, avec encore des sujets qui sont traités en mode projet, parce que tu ne peux pas bouger une entreprise comme ça du jour au lendemain. Pour te donner un exemple concret, moi j'ai accompagné des chaînes de valeur sur des sujets, qui travaillait avec des partenaires qui n'étaient pas agiles. Donc forcément, tu ne peux pas, du coup, demander à ces équipes de travailler 100% en mode agile. Donc tu as une adaptation. Mais moi, voilà, je retiens juste les bonnes choses, c'est-à-dire, finalement, j'oublie le wording et tout le jargon. Mais moi, ce que je retiens, c'est OK, c'est positif s'il y a des instances qui font que les personnes, elles peuvent communiquer entre elles et identifier au plus tôt les dépendances. Il y a des instances qui permettent aux gens de prioriser par la valeur et les pousser à avoir une stratégie pour justement dérisquer au plus tôt. Donc, en gros, s'appuyer sur toutes les méthodes O, par exemple, Lean Startup. C'est ça, en fait, qui m'intéresse, pas le framework en soi.

Terry : J'aimerais revenir sur la partie priorisation par la valeur. Une fois qu'on a compris le principe de se dire que ce qui compte ce n'est pas le nombre de fonctionnalités que je vais livrer mais la valeur que ces fonctionnalités apportent à mes utilisateurs ou à mes clients qui parfois sont différents, parfois sont les mêmes. le sujet derrière il est de se dire ok bon j'ai compris que ce que je veux c'est de la valeur et non pas x fonctionnalités maintenant une fois que je sais ce que je veux comment je mesure la valeur que je réussis à apporter à mon client et comment derrière j'arrive du coup à savoir la performance ou pas d'une équipe sur un axe vers lequel cette équipe a été fléchée c'est à dire voilà toi tu te concentres sur la valeur apportée au client par rapport à ça comment est-ce que je fais pour mesurer cette performance-là de l'équipe, et du coup savoir si effectivement la valeur attendue a été apportée, et pour pouvoir derrière évidemment piloter l'évolution de l'équipe, sa progression, etc.

Dounia : Pour moi, il y a deux choses. Il faut commencer par le commencement, c'est-à-dire qu'il faut d'abord être capable de poser des hypothèses. Ça, nous, en tant que coach, c'était notre rôle. C'est-à-dire qu'au niveau, par exemple, des initiatives qui sont lancées, Un exemple concret, une initiative, c'est par exemple un nouveau service. Donc c'est ça, vraiment pour donner la différence entre une feature qui serait, tiens, je refonds le parcours de souscription de telle page. Un niveau initiative, c'est, ok, je fais un nouveau service, par exemple. Donc le job, ça va être d'aider l'équipe à poser des hypothèses, c'est-à-dire de se dire, nous pensons qu'en proposant ce nouveau service, on va pouvoir accroître le CA de tant de pourcents et puis on va répondre à tel problème utilisateur. Et ça, finalement, ce n'est qu'une hypothèse. Donc déjà, on va aider l'équipe à formaliser l'intention sous forme d'hypothèses comme ça. Donc ça, c'est clairement des outils. On n'a rien inventé. C'est les outils d'une startup. Tu sais, je pense qu'en faisant tel truc, ça va permettre de faire ça. Et c'est un succès si. Et en fait, quand je te dis commencer par le commencement, c'est ça, c'est d'être capable de formaliser ça en disant, je pense que c'est un succès si j'ai atteint telle ou telle chose. Donc déjà, on commence par formaliser des hypothèses. Et après, en fait, on va faire des tests utilisateurs. Et donc là, on va voir si effectivement les résultats correspondent aux hypothèses qu'on s'était fixées. Et de là, soit on va pivoter, soit on va arrêter, soit on va poursuivre. Ça c'est une première chose. Et la deuxième, au-delà des KPI, qui sont vraiment pour le coup le mode projet, de dire finalement Mon sujet sur lequel je travaille, j'espère faire un CA de X K Euro. Comme je te disais tout à l'heure, un KPI, tu ne peux que le constater a posteriori. Une fois que tu as lancé ton truc, tu dis ok, j'ai atteint le X ou pas. Là, en fait, nous, en tant que coach, le job, c'est d'aider les équipes à identifier ce qu'on appelait des indicateurs précurseurs en anglais. Tu sais, on parle de leading indicator, en fait. Et donc ces indicateurs-là, justement, c'est sensibiliser sur le sujet de comment je m'assure que j'avance dans la bonne direction. Plutôt qu'attendre finalement que le truc soit lancé et le constater, c'est par exemple se dire Si finalement les personnes, j'ai augmenté mon taux de conversion de tant de pourcents, ou si finalement les personnes restent plus longtemps sur ma page etc, ok c'est déjà un bon indicateur. Donc en fait c'est ça quoi, c'est de les aider à matérialiser ça avec ces indicateurs précurseurs.

Terry : Pour faire le lien avec les indicateurs, c'est aussi pour embarquer les équipes et pouvoir les aligner. La question que je t'ai posée c'est aussi dans un souci d'alignement. Si on a un objectif commun qui est assez clair, ça permet de beaucoup plus facilement aligner les équipes vers ce qu'on va chercher. D'où l'intérêt de mettre des indicateurs, comme tu disais là aussi, qu'on souhaite atteindre, donc les leading indicators, et voir si ça commence à bouger dans le bon sens ou pas. Et toujours dans cette logique du coup d'alignement, on parlait un petit peu en off avant, un épisode que j'ai fait avec Judy Chalumeau de chez Checkout sur le monde des scale-up et elle parlait notamment en fait de la structuration des différentes équipes et qu'à ce moment là, quand ils ont commencé à vraiment grossir de manière importante en termes d'effectifs, ils ont fait venir aussi des coachs qui sont venus évangéliser les pratiques et qui ont notamment à l'expliquer un point que je trouvais assez intéressant, c'est qu'elle disait qu'il y en avait qui venaient parler et répéter beaucoup de fois un peu sur les cérémonies qu'on peut avoir classiques dans des frameworks type safe. et qu'il les faisait de manière assez répétitive et au début elle se disait bon ça semblait un peu être beaucoup pour pas grand chose et en fait elle a réalisé un an plus tard que derrière c'était ces équipes là qui avaient le plus évangélisé, qui étaient le plus connu au sein de l'organisation et qui arrivaient du coup à gagner le plus de légitimité, enfin à faire avancer les choses plus vite parce que du coup de par ce travail d'évangélisation elle s'était fait connaître, elle avait expliqué ce qu'elle faisait et même si parfois elle répétait les mêmes choses ça a permis une acculturation globale de ce qu'il faisait à toute l'entreprise. Là-dessus, je suis curieux d'avoir ton retour d'expérience, ton avis là-dessus, et notamment avec la partie aussi de ce que tu disais en intro, tu t'es intéressée au sujet de la facilitation, et comment ça peut t'aider sur ce job-là.

Dounia : Justement, moi j'avais écouté cet épisode, effectivement je voyais déjà beaucoup de... de similitudes avec les grands groupes, en tout cas type Orange, qui ont réellement mis en place une transfo agile à l'échelle, et les scale-up notamment, tu vois, typiquement, quand tu as parlé de ces intentions, ces briefs d'initiatives, bon ben voilà, c'est ce que tu vas retrouver dans les instances que j'évoquais. Là, le sujet de répéter, répéter, comme tu disais, est-ce que ça fonctionne vraiment ? Oui, c'est un peu le job de coach. Alors c'est pas répété en imposant la culture produit, attention, c'est sûrement pas en arrivant et en disant en fait il faut travailler comme ça, mais ça va être vraiment par tout simplement l'expérience. Comme je le disais tout à l'heure, soit faire venir des gens qui vont parler de ce qu'ils ont mis en place, et puis répéter dans le sens, en fait, à chaque fois, travailler, par exemple, avec ces mêmes équipes ou des collectifs qui font partie de la même chaîne de valeur avec ces méthodos, donc design thinking, lean startup, atelier collaboratif, pour, par exemple, travailler pour identifier un nouveau service ou accompagner des équipes opérationnelles, par exemple, via un design sprint. le fait d'en faire un, puis deux, puis trois. Finalement, comme les gens après se rendent compte que ça fonctionne, c'est-à-dire qu'on va plus vite, pour te donner un chiffre très concret, le lead time, qui est donc un indicateur en gros qui va mesurer entre le début de ta demande et finalement quand t'as livré le produit, Grâce à cette transpho, chez Orange, il est passé de plus de 8 mois à 4 mois. Donc il y a quand même des éléments tangibles qui permettent de montrer que ça fonctionne. Et en fait c'est ça, quand tu fais une fois, deux fois, trois fois, et que tu t'aperçois quand même que ça fonctionne, on délivre de la valeur plus vite. Ça va inciter d'autres équipes à le faire. Et puis aussi, il y a comme un peu un réflexe qui est pris. Et donc, notamment nous, au sein des équipes, soit en tant que coach, on sentait par exemple qu'il y avait potentiellement un sujet qui, parce qu'il est complexe. Complexe, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que c'est compliqué. C'est-à-dire que quand t'as plein d'interlocuteurs, quand t'as plein d'outils IT, tu dois aligner plein de gens autour d'objectifs. Tu te dis là, OK, il faut peut-être quelqu'un d'externe, donc un facilitateur qui va accompagner l'équipe. Ça en fait, nous on le faisait, on allait voir des gens pour les aider, mais après il y avait aussi ce réflexe de venir tout simplement voir le coach parce que justement il y avait ce réflexe qui était pris puisque ça avait fonctionné soit pour eux sur d'autres sujets, soit pour d'autres équipes. Voilà. Et sur le sujet, du coup, facilitation, là, clairement, oui, au-delà de moi, par exemple, de ma casquette de coach, qui était d'insuffler cette culture produit, comme je l'ai dit tout à l'heure, en aidant les équipes, en les challengeant sur le pourquoi, en apportant des outils, en gros, de toutes ces méthodes O, Lean Startup, etc., il y avait aussi toute une partie qui est tout simplement comment, dans une société où on a des milliers de personnes, avec toute cette complexité, on fait travailler les gens ensemble pour qu'ils s'alignent le plus tôt possible. Et ça, c'est vraiment le rôle d'un facilitateur. Et donc ça, je l'ai fait à tous les niveaux, que ce soit des niveaux codire ou équipes opérationnelles. Je ne sais pas si tu veux que je te dise un truc en particulier sur ça, parce que c'est un vaste sujet.

Terry : Oui, on va pouvoir le creuser, mais du coup, ça me fait penser, en parlant de ce sujet facilitation, à une question, alors après, je ne sais pas si tu as un avis tranché là-dessus, mais ça m'y a fait penser, donc je te la pose, au sujet du télétravail. Et du coup, dans le rôle spécifique de facilitateur, d'insuffler comme ça ce type de culture, est-ce que toi, tu as un avis justement sur cette question-là ? Est-ce que tu peux le faire à distance ? Est-ce qu'il faut être en présentiel ? Comment ? l'équilibre entre les deux. Parce que je pose cette question, donc là on enregistre en début de 2024, on voit notamment sur cette année 2024 que les grands groupes reviennent pas mal en arrière sur la politique de télétravail qui avait été mise en place juste post-Covid, c'est-à-dire que beaucoup maintenant demandent un temps de présence minimum par semaine, même sur des missions d'externe, ils demandent que les gens soient sur site X jours par semaine, donc je suis curieux d'avoir ton avis là-dessus.

Dounia : Oui. Alors justement, j'ai eu les deux cas, c'est-à-dire que j'ai fait aussi bien de l'animation d'ateliers pendant le Covid, donc en full télétravail, full distance. En plus, c'était une mission de coach agile, donc il y a quand même beaucoup d'humains. Donc déjà l'onboarding à distance c'est quand même compliqué. Donc là honnêtement je trouve que quand tu arrives sur du 100% télétravail, donc t'as même pas eu d'onboarding physique, je trouve que c'est très compliqué de faciliter parce que le facilitateur il faut qu'il crée un climat de confiance. Donc en plus quand tu es à distance, que des gens ne mettent pas la caméra, Créer ces conditions, c'est honnêtement vraiment difficile. Après, sur d'autres ateliers que j'ai pu faire en tant que facilitatrice jusqu'à présent et aussi en tant que formatrice, parce que du coup j'ai aussi des formations à distance sur la facilitation ou le design thinking, Honnêtement, bien évidemment, le présentiel, pour moi, c'est toujours mieux, parce que de toute façon, tu vas capter de l'informel qui sera plus difficile à distance. Néanmoins, on a de la chance d'avoir des outils super, si on peut citer des noms. Par exemple, tu vois, Miro. un outil que j'utilise au quotidien. Et en fait, on a beaucoup travaillé quand j'ai animé des collectifs, qu'il y ait 10 personnes ou 30 personnes, avec des outils type Miro à distance, ça se faisait très bien aussi. En fait, il faut juste un bon dosage, c'est-à-dire que je pense que le top, quand tu fais par exemple de la créativité, bien évidemment, je trouve que le présentiel reste ce qu'il y a clairement de mieux. Après, à l'inverse, quand tu es par exemple sur un atelier où tu vas vraiment faire de la convergence et tu vas être sur du plan d'action, Bah finalement ça peut être même peut-être plus efficace tu vois si t'es sur un atelier de deux heures à distance tu sais que tu vas pas partir tu peux pas partir sur d'autres sujets t'es obligé d'être encore plus carré sur ton planning et ton heure du jour et ça peut se faire et bien évidemment Moi, j'ai aussi eu la chance d'accompagner des équipes sur la durée. Donc à force, tu vois, tu connais les personnes, donc tu peux faire X ateliers en présentiel et Y ateliers à distance. Mais j'avoue que dans le cas que je citais, tu vois, en plein Covid, de n'avoir que des gens à distance, c'est... C'est une galère. En revanche, le truc que je ne recommande pas, c'est l'hybride. Et d'ailleurs, il m'arrive de dire non, en fait. Je suis passée par ça, l'hybride, d'avoir X personnes à distance et d'autres en présentiel. Alors déjà, il y a des points logistiques qui sont que les gens qui sont en présentiel, forcément, ils vont parler, il va y avoir des cercles. Donc c'est très, très difficile pour ceux qui sont à distance de rester engagés. C'est un enfer et moi je disais soit on a un full présentiel et s'il y a vraiment des gens importants pour l'atelier et que malheureusement pour x raisons tu as parfois des gens qui vivent et travaillent en région, en fait on fait à distance pour tout le monde.

Terry : — Hyper intéressant. Globalement, tout ce que tu partages là, moi, je le partage aussi sur ces points que tu disais. C'est vrai que l'onboarding est hyper important, je pense, de le faire en présentiel justement pour connaître les gens. Et après, ce que je trouve intéressant dans ce que tu disais sur les sujets ateliers de créativité versus d'autres sujets peut-être d'alignement, Ça met, je trouve, une couche supplémentaire sur, on va dire, ce qu'on pourrait penser naturellement. On pourrait dire que le télétravail, quand tu travailles de fond, en mode focus, seul, c'est très bien, mais dès que c'est en groupe, c'est pas top. Là, je trouve que c'est intéressant parce que ce que tu dis, c'est pas non. Dès que c'est en groupe, c'est pas top. Si c'est en groupe pour de la créativité, effectivement, avoir les cerveaux dans la même pièce, ça permet de créer une émulation collective. Mais si c'est en groupe pour de l'alignement, pourquoi pas en remote et parfois c'est même mieux parce que comme tu le disais, ça force à bien cadrer les choses et s'assurer qu'on tient dans l'agenda. Donc ça je trouve ce retour assez intéressant.

Dounia : Et petit tips aussi de facilitateurs qui fonctionnent bien quand t'es à distance, c'est aussi de demander, alors là pour le coup il faut relancer plein de fois, mais de demander du coup aux interlocuteurs comme tu sais que ton timing tu vois il est il est assez serré et qu'à distance, t'es obligé, toi en tant que facitateur, d'être un peu partout, de demander aux gens en amont, par exemple, de poser des post-it. Typiquement, tu veux faire un atelier, pour te donner un exemple concret, un atelier speedboat. C'est un atelier où tu vas demander aux gens quels sont les freins qui t'empêchent d'avancer, quelles sont les opportunités. Moi j'ai fait faire ces post-it là en amont, en donnant une deadline, ce qui me permettait moi en tant que facilitatrice du coup de faire ce regroupement de post-it déjà avant l'atelier, donc c'est un gain de temps énorme. Et du coup, au moment de l'atelier à distance, tu vois, j'ai déjà sur mi-route tous mes post-it, donc déjà je prends un peu le pouls aussi de l'équipe, quelles sont les douleurs et les points positifs qu'ils ont mis. et c'est un gain de temps parce que j'ai déjà du coup ma matière structurée donc au contraire parfois c'est un petit plus si les gens jouent le jeu, ça c'est plus dur.

Terry : — Très clair. Du coup, toujours sur ce sujet de facilitation, je suis intéressé d'avoir des retours d'expérience, de choses que t'as apprises, vraiment des choses qui t'ont marqué. Tu te dis, voilà, ça va me servir aussi plus tard. Tu vois, des situations peut-être difficiles, mais sur lesquelles t'as beaucoup appris. Puisque là, on voit les côtés positifs. Mais effectivement, la facilitation, c'est pas quelque chose de simple. Il y a beaucoup, beaucoup d'humains dedans. Donc de l'apprentissage qui vient avec l'expérience, donc je suis curieux de savoir toi aujourd'hui quels sont les moments qui t'ont marqué et l'expérience que tu en retires aujourd'hui sur ces aspects-là, facilitatrice.

Dounia : Il y en a pas mal, je dirais que quand tu facilites des ateliers, oui c'est un job, je le dis aux gens parce qu'il y en a qui pensent que tu es animateur, un peu comme un Master of Ceremony, un MC. Non, en fait, c'est un job parce que la félicitation, c'est à la fois capter très vite les enjeux, les objectifs qu'on te donne, avoir une bonne capacité aussi d'intelligence émotionnelle. C'est tout ça. Donc, c'est un vrai job. Et pour moi, je dirais que c'est vraiment le fait d'avoir animé beaucoup, beaucoup d'ateliers qui m'ont permis un peu de tirer des enseignements. Un des enseignements que tu as évoqués, c'est forcément l'humain. Donc, il faut se dire qu'une des qualités du facitateur qui doit avoir, c'est l'adaptation. Donc, moi, je voyais, par exemple, avec des équipes, J'avais par exemple les challenger sur un sujet et je voyais que ça s'apprenait pas. En me disant bon bah je sais pas j'ai l'impression que c'est moi qui ai l'air de tu vois je leur parle une autre langue. Et j'ai fait après d'une autre manière avec eux c'est passé et du coup pour d'autres équipes je me suis dit bah ok je vais peut-être prendre cette approche là c'est à dire que Il y a des personnes qui ont besoin d'être tout de suite sur du concret pour un peu prendre de la hauteur. À l'inverse, tu vois, tu en as d'autres qui, tout de suite, vont être sur la prise de hauteur. Et dès qu'il va falloir être dans des choses plus concrètes, elles auront plus de mal. Donc, en fait, il faut juste s'adapter à ces interlocuteurs. Après sur d'autres choses, typiquement les exercices entre guillemets que tu mets en place lors d'ateliers collaboratifs, moi un des tips que je donne en tout cas quand je dispense des formations, c'est de dire aux gens, partez sur des exercices simples et faites vous-même un peu comme un cobaye, c'est-à-dire que tu réfléchis à un déroulé et toi-même tu essayes de trouver des réponses. Si tu vois que tu galères, c'est que déjà il y a un souci, il faut que tu changes de déroulé. C'est aussi un de mes apprentissages, c'est de me dire que moi-même je vais essayer d'être dans la peau du participant. C'est l'expérience, c'est la gestion des conflits. À force, tu commences à identifier le type de profil, et tu sais qu'entre le bavard ou le réfractaire, il y a des petites techniques via des questions, via le regard, des missions que tu vas donner aux gens, de synthétiser, de prendre la parole, etc. en fonction des profils des participants.

Terry : Hyper intéressant, et là-dessus tu aurais une ressource clé qui te vienne en tête par exemple sur la gestion des conflits ?

Dounia : Alors sur la gestion des conflits, oui alors tu peux trouver des ressources par exemple dans des bouquins. Moi j'ai par exemple, je ne suis pas fan de la littérature produite, je préfère lire des romans, mais il y a des outils qui sont très concrets, des livres qui mettent en avant des outils très concrets. Donc je pense par exemple à passer en mode workshop, qui est un livre où tu vas avoir des déroulés d'ateliers, des exemples d'outils concrets pour avoir, par exemple, le point que tu évoques de comment tu fais parler des gens sur des sujets touchy, etc. Et puis après, sur l'aspect humain, moi je trouve que, tu sais, tous les blogs sur l'agilité, c'est vraiment une mine d'or. Je pense qu'il y a beaucoup de gens qui ne vont peut-être pas sur ces sites en se disant « attends, c'est des trucs qui parlent d'agilité ». En fait, sur beaucoup de blogs d'agilité, tu as des outils et des tips très concrets sur de l'animation d'atelier et de l'humain. Donc je pense plutôt à ce type de ressources.

Terry : Hyper intéressant, ça ne me serait pas venu à l'idée effectivement les blogs sur la GT. J'avais en tête moi le bouquin de Marshall Rosenberg, Communication non violente, mais après qui est plus global, qui va au-delà de dérouler des workshops, qui est vraiment une façon de gérer des conflits au global, mais où il y a des ponts aussi je trouve qu'on peut faire quand on anime des ateliers. Pour revenir un tout petit peu sur le monde du coup, plus des scale-up versus ou avec celui des grands groupes, puisqu'en gros une scale-up c'est aussi une boîte qui est en train de se structurer pour devenir à terme, si elle continue, elle périclite un grand groupe. Qu'est-ce que t'aimerais, est-ce qu'il y a un message en particulier que t'aimerais faire passer, ou en tout cas pour toi, quelles choses peuvent être apprises d'un monde versus de l'autre ? comment est-ce qu'on pourrait un peu reconnecter ces deux mondes qui peuvent parfois paraître déconnectés et en réalité quand t'es dedans, quand t'es dans le concret, voilà on parlait de l'épisode que j'ai fait avec Julie de chez Checkout, on se rend compte qu'il y a beaucoup de similitudes, les marchés qui sont adressés sont parfois différents et c'est ça qui fait aussi la différence sur l'innovation qui a été créée par Potential Mainscaleup et le grand groupe qui est là depuis Mais après sur les fonctionnements internes des organisations, ça reste des organisations où il y a beaucoup de monde et qui font du business, donc on retrouve beaucoup de similitudes. Est-ce qu'il y a des points, un message en particulier ?

Dounia : Oui, moi, comme je te le disais, vraiment mon constat, que ce soit en discutant avec mes pères ou des pères ou en écoutant des podcasts ou écouter beaucoup de reste, j'ai vraiment vu beaucoup de similitudes et donc moi j'invite juste tout le monde à aller voir ce qui se passe finalement ailleurs dans les autres structures. Tu vois, en design thinking, on parle pas mal de pensée latérale, tu vois, le fameux think out of the box. Concrètement, ça veut dire aussi s'inspirer de ce qui est fait ailleurs, pas que dans ton domaine. Et ça vaut, je trouve, pour l'écosystème start-up ou les grands groupes. Je trouve qu'il y a un peu cette tendance parfois à regarder un peu les best-in-class, par exemple, de l'écosystème start-up et les grands groupes, de regarder un peu tous ces gros frameworks des voisins qui l'ont mis en place. En fait ce que je trouve dommage c'est justement de ne pas regarder ce qui se fait dans les structures qui n'ont rien à voir parce qu'en fait tu peux peut-être justement te dire que par exemple si tu scales forcément tu vas avoir des problématiques qu'un grand groupe a eu. Et donc il y a peut-être des choses à prendre, peut-être des inspits, ou à l'inverse, peut-être des choses qui sont peut-être des choses sur lesquelles il ne faut surtout pas partir. Mais tu ne le sauras pas si tu n'es pas allé observer et regarder ce qui s'est fait ailleurs. Donc moi, j'incite vraiment les gens à écouter des règles de personnes qui ont mis en place ou qui ont travaillé justement dans des organisations très différentes. Et vraiment, je citais l'exemple tout à l'heure, je disais, mais c'est marrant, il y a des choses, je pense, le wording est différent, mais c'est exactement les mêmes manières de travailler une orgue à produit. Mais ça, on le sait que si on veut bien écouter ce qui se fait ailleurs.

Terry : — Très clair. Du coup, avant d'aller vers mes deux questions de fin d'échange, est-ce qu'il y a un point en particulier qu'on n'a pas assez abordé ou un sujet que tu voudrais encore spécifier ?

Dounia : — Ouais, j'ai l'impression qu'on a parlé pas mal de choses, de fascination, de... de cultures produites dans les grands groupes, l'appareil de pilotage de la valeur. Sauf si tu as une question plus précise sur un truc, moi je pense que j'ai adressé en tout cas les choses qui me tenaient à cœur.

Terry : Top, c'est très bien. Pour aller vers mes deux questions de fin d'échange, la première c'est est-ce que tu as une conviction forte avec laquelle tu te retrouves en général en désaccord avec tes pairs ?

Dounia : Oui, c'est typiquement ce qu'on vient de dire à l'instant. Ce n'est pas tous les paires, mais je trouve qu'il y a une vision un peu dogmatique et caricaturale, il me semble, du product management parfois. C'est-à-dire que la vision dogmatique, ce que j'entends par là, c'est qu'on a l'impression que certains ont tendance à croire qu'il y a une bonne manière de faire du produit que si on n'utilise pas tel ou tel framework ou tel outil que un des grands experts produits a dit qu'il fallait faire, du coup c'est qu'on fait mal du produit. Je trouve que c'est un peu dommage parce que finalement la meilleure pour moi approche produit c'est celle qui fonctionne. Voilà tout simplement alors ok peut-être qu'il y a des choses qui sont pas super je sais pas dans dans le framework safe mais peut-être des choses intéressantes que tu peux prendre et c'est pas grave si tu prends pas tout pareil pour le la méthode agile enfin voilà tout tout le monde ne peut pas il ya des trucs que tu peux pas répliqués à 100% et c'est pas l'objectif. Pour moi ce qu'il faut retenir c'est le mindset. Donc voilà, je trouve que cette vision dogmatique c'est un peu dommage et du coup je reviens sur le fait qu'il faut tout simplement s'ouvrir aux autres et plus le prendre en inspiration et essayer de voir ce qu'on peut prendre de bon, adapter ou pas du tout quoi, éviter. Voilà.

Terry : Apprendre de l'expérience des autres aussi pour construire au fur et à mesure et pas réinventer la roue ou résoudre des problèmes plus rapidement parce qu'en fait ils ont déjà été résolus par d'autres.

Dounia : C'est ça, moi je sais que je passe beaucoup de temps à écouter des podcasts, à me nourrir de Rex, vraiment d'être beaucoup dans l'observation, dans l'écoute des autres pour essayer moi aussi de m'améliorer dans ma pratique.

Terry : Top, du coup ça vient vers ma dernière question, quelles sont les choses qui t'inspirent, qui te nourrissent intellectuellement ? C'est pas nécessairement des choses pro, ça peut être d'autres choses, mais voilà, l'idée c'est de voir comment tu penses aussi.

Dounia : Dans les choses pro, donc voilà, quand même tous les podcasts qu'il peut y avoir en product management, que beaucoup de gens connaissent, je sais pas s'il faut les citer. mais voilà, podcast sur le produit, mais également plus business, tu vois, type Génération de Week Yourself, ce genre de podcast. Moi, j'aime aussi écouter des recs, comme je te disais, vraiment des recs concrets d'entreprises ou de retours de personnes qui ont travaillé dans des organisations. Je suis moins sûre de la littérature, comme je te disais, de méthodes. En revanche, je te citais tout à l'heure passer en mode workshop, et d'ailleurs je les cite aussi quand je dispense des formations, il y a Game Storming, ce genre de livre. qui sont vraiment des livres avec des outils très concrets pour animer des ateliers collaboratifs. Donc ça, c'est des sources. Les livres, tu peux trouver vraiment des trucs intéressants en animation d'atelier. Et puis moi j'aime bien aussi tout simplement me nourrir avec des livres qui ne sont pas forcément en lien direct avec le product management. Mais par exemple tu vois là je suis en train de lire un livre qui s'appelle « Les maîtres de la manipulation » et c'est hyper intéressant. Ça te montre en fait comment au fil des temps, au fil du temps, tous les grands publicitaires ou les Disney et autres ont façonné le monde avec des techniques bien connues qu'on utilise encore. Et ça, voilà, c'est aussi hyper intéressant d'élargir sa vision avec ça.

Terry : Top, merci pour tous ces partages d'expérience Dounia, et à bientôt.

Dounia : A bientôt, merci Terry.

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Just a Click c'est le podcast français du Product Management. On y parle de Tech, de Design et de Business.

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